Vapotage et reflux gastrique : ce que disent les études et comment adapter votre e-cigarette

Vapotage et reflux gastrique : ce que disent les études et comment adapter votre e-cigarette

Brûlures d’estomac après avoir vapoté ? Gorge qui pique, remontées acides en soirée, alors que vous avez l’impression de « peu tirer » sur votre e-cigarette ? Vous êtes loin d’être seul.

Depuis quelques années, de plus en plus de vapoteurs parlent de reflux gastrique, de brûlures et d’irritations digestives liées au vapotage. Certains accusent les e-liquides, d’autres la nicotine, d’autres encore les sels de nicotine ou les arômes mentholés. Entre les forums, les réseaux sociaux et le marketing, difficile d’y voir clair.

On va donc faire ce que les vendeurs de rêves ne font jamais : regarder ce que disent réellement les études, comprendre les mécanismes possibles… et surtout voir comment adapter concrètement votre vape si vous avez des problèmes de reflux.

Vapotage et reflux gastrique : y a-t-il vraiment un lien ?

Pour commencer, petit rappel express : le reflux gastro-œsophagien (RGO), c’est quand une partie du contenu acide de l’estomac remonte dans l’œsophage. Résultat :

  • brûlures derrière le sternum, surtout après les repas ou en position allongée
  • remontées acides dans la gorge ou la bouche
  • toux irritative, gorge qui brûle, voix enrouée
  • parfois une sensation de « boule » dans la gorge

Le tabac classique est clairement identifié comme aggravant du reflux. Pour la vape, les données sont plus récentes, mais plusieurs travaux pointent des effets possibles :

  • irritation de la muqueuse œsophagienne par certains composés de la vapeur
  • effets de la nicotine sur le sphincter inférieur de l’œsophage (la « valve » entre estomac et œsophage)
  • toux et micro-inhalations répétées qui augmenteraient la pression intra-abdominale

En résumé : la vape n’est pas neutre. Elle semble globalement moins agressive pour le reflux que le tabac fumé, mais elle peut clairement déclencher ou accentuer des symptômes chez certains profils, surtout quand le matériel ou les liquides ne sont pas adaptés.

Ce que disent les études (sans filtre marketing)

Les recherches sur le vapotage évoluent vite, mais on retrouve plusieurs points récurrents dans les études et revues de littérature médicale :

  • La nicotine reste un acteur central : elle peut diminuer le tonus du sphincter œsophagien inférieur, ce qui facilite les remontées acides. Cet effet est bien décrit pour la cigarette, et plusieurs travaux suggèrent qu’il existe aussi avec la nicotine vapée, même si l’intensité peut varier selon les doses et le mode d’administration.
  • Le vapotage génère des irritants : le propylène glycol (PG), la glycérine végétale (VG) et certains arômes peuvent produire, à forte température, des composés irritants (aldéhydes, etc.) susceptibles d’enflammer légèrement la gorge et l’œsophage chez les personnes sensibles.
  • La toux de vapoteur débutant : plusieurs études observationnelles relèvent une toux plus fréquente chez les nouveaux vapoteurs. Ces quintes peuvent augmenter la pression dans l’abdomen et aggraver des reflux préexistants.
  • Vape vs cigarette classique : les données actuelles vont globalement dans le même sens : chez les fumeurs qui passent à la vape, les symptômes de reflux ont plutôt tendance à diminuer ou à se stabiliser, mais une partie des utilisateurs rapportent une aggravation ou l’apparition de symptômes digestifs nouveaux.

Important : ces études restent souvent de taille modeste, avec des limites méthodologiques. On ne peut pas affirmer que « la vape donne du reflux », ni l’inverse. En revanche, on a suffisamment de signaux pour dire :

  • si vous avez déjà un RGO, la vape peut l’aggraver selon votre façon de vapoter
  • si vous n’avez pas de reflux, certaines habitudes de vape peuvent favoriser l’apparition de brûlures ou d’irritations digestives

C’est là que le réglage de votre matériel, la composition de votre e-liquide et votre manière de tirer jouent un rôle clé.

Les principaux facteurs de votre e-cigarette qui peuvent favoriser le reflux

Tous les setups ne se valent pas du point de vue du reflux. Certains paramètres augmentent clairement le risque d’irritation ou de brûlures.

Le taux de nicotine : premier suspect

Plus la dose de nicotine absorbée est élevée, plus le risque d’effet sur le sphincter œsophagien augmente. Deux points à garder en tête :

  • Taux trop élevé : si vous vapotez en 12, 16 ou 20 mg/ml avec des bouffées très fréquentes, vous cumulez :
    • relaxation du sphincter (porte ouverte aux remontées acides)
    • nausées possibles, brûlures, inconfort digestif
  • Surconsommation « discrète » : avec les sels de nicotine, l’inhalation est plus douce. On peut facilement vapoter beaucoup plus sans s’en rendre compte, et donc augmenter mécaniquement la dose de nicotine totale reçue sur la journée.

Si vos brûlures d’estomac sont apparues après un changement de taux ou de type de nicotine, ce n’est probablement pas un hasard.

PG/VG : un équilibre à revoir si vous êtes sensible

Le propylène glycol (PG) est reconnu pour :

  • booster le « hit » en gorge
  • assécher les muqueuses (bouche, gorge, parfois œsophage)

Chez certains vapoteurs sujets au reflux, les liquides très riches en PG (60/40, 70/30, voire plus) provoquent :

  • gorge sèche, irritée
  • toux plus fréquente
  • sensation de brûlure qui peut se confondre avec le reflux ou l’aggraver

A contrario, la glycérine végétale (VG) est plus douce, mais :

  • plus visqueuse (attention à la compatibilité avec votre matériel)
  • peut donner une sensation de lourdeur, voire de « boule dans la gorge » chez certains

Là encore, tout est affaire d’équilibre… et de test en conditions réelles.

Arômes mentholés, frais, acidulés : faux amis des estomacs sensibles

Les arômes suivants reviennent souvent dans les témoignages de vapoteurs avec reflux aggravé :

  • menthe très forte, menthol, e-liquides « ice » : effet rafraîchissant agréable, mais très irritant pour certains, surtout en inhalation directe (DL) avec gros volume de vapeur
  • arômes d’agrumes, cola, bonbons acidulés : certains concentrés sont perçus comme « acides », ce qui peut majorer la sensation de brûlure en gorge
  • liquides très sucrés : ils ont tendance à donner soif, à assécher encore plus la bouche, ce qui n’aide pas en cas de reflux

Non, un citron « chimique » dans votre e-liquide ne rend pas votre estomac plus acide, mais il peut renforcer la gêne ressentie et entretenir l’irritation locale.

Puissance, température et manière de tirer

Plus vous montez en puissance, plus la température de la résistance augmente et plus vous produisez :

  • de vapeur à chaque bouffée
  • de composés potentiellement irritants (en cas de température trop élevée ou de surchauffe du liquide)

Additionnez cela à :

  • des bouffées longues
  • un taux de nicotine élevé
  • un arôme frais ou mentholé très fort

… et vous obtenez un cocktail parfait pour irriter gorge et œsophage, et parfois réveiller un reflux latent.

Comment adapter votre vape si vous souffrez de reflux gastrique

La bonne nouvelle : dans la majorité des cas, on peut réduire significativement les symptômes en ajustant quelques paramètres de la vape, sans forcément arrêter complètement la cigarette électronique.

Revoir le taux et le type de nicotine

Si vous avez des brûlures d’estomac, des nausées légères ou une gêne digestive après vos sessions de vape, commencez par là :

  • Évaluer votre consommation réelle : combien de ml par jour ? À quel taux de nicotine ? Si vous êtes en 20 mg/ml et que vous videz 3 pods par jour, le problème est probablement plus nicotinique que gastrique.
  • Tester une légère baisse de taux : passer de 12 à 9 mg/ml, ou de 20 à 16 mg/ml, tout en surveillant les envies de fumer. L’objectif n’est pas de vous sevrer à tout prix, mais de trouver le point d’équilibre entre confort digestif et absence de manque.
  • Comparer sels de nicotine et nicotine classique : certains digèrent mieux les sels (moins de hit, inhalation plus douce), d’autres les supportent mal (ils enchaînent les bouffées sans s’en rendre compte). Notez vos sensations sur quelques jours pour trancher.

Si la baisse de nicotine améliore nettement vos symptômes sans réveiller les envies de cigarette, vous avez trouvé un levier important.

Ajuster le ratio PG/VG pour ménager votre œsophage

Dans une logique « anti-irritation », beaucoup de vapoteurs avec reflux trouvent un meilleur confort avec :

  • des liquides autour de 50/50 PG/VG si leur matériel le permet
  • voire 60/40 ou 70/30 VG/PG pour ceux très sensibles au PG (à condition d’avoir une résistance adaptée)

Quelques repères pratiques :

  • si vous avez la gorge qui gratte, qui pique, toux sèche et sensation de brûlure → essayez d’augmenter la part de VG
  • si vous sentez la vapeur « lourde » et que vous avez l’impression de forcer à l’inhalation → ne montez pas trop haut en VG sur du matériel peu aérien

N’hésitez pas à tester 2 ratios différents sur une semaine chacun, avec le même arôme et le même taux de nicotine, pour isoler l’effet PG/VG.

Limiter les arômes les plus agressifs

Sans tomber dans la paranoïa, certains profils d’arômes méritent d’être mis entre parenthèses si vous êtes sujet au reflux :

  • Mettre de côté menthols ultra-frais et « ice » pendant 10 à 15 jours pour voir l’évolution.
  • Réduire les agrumes très prononcés si vous avez la gorge qui brûle en fin de journée ou la nuit.
  • Tester des arômes plus neutres (classiques doux, desserts légers, fruits non acides) pendant une période test.

C’est rarement la partie la plus « sexy » du protocole, mais c’est souvent là que certains se rendent compte qu’un simple changement d’arôme réduit drastiquement leurs symptômes.

Adapter puissance, airflow et technique de tirage

Quelques ajustements simples peuvent faire une vraie différence :

  • Réduire légèrement la puissance : si vous êtes à 30 W sur une résistance donnée, essayez 24–25 W et observez. Moins de chaleur, moins d’irritation potentielle.
  • Éviter les chain-vapes : enchaîner les bouffées sans pause augmente la chaleur accumulée et la dose d’irritants inhalés sur un temps court.
  • Privilégier une inhalation indirecte (MTL) si vous êtes très sensible, avec des bouffées plus courtes et plus espacées.
  • Surveiller votre posture : vapoter affalé juste après un gros repas, en position semi-allongée, est une excellente recette pour provoquer un reflux.

L’idée n’est pas de vous transformer en moine zen de la vape, mais d’éviter les gros pics d’exposition qui irritent inutilement votre système digestif.

Hydratation et habitudes de vie : le combo qu’on sous-estime

La vape assèche les muqueuses, c’est inhérent au PG et à la VG. Or, une muqueuse sèche est plus vulnérable à l’acide gastrique.

Quelques gestes simples :

  • boire régulièrement de l’eau tout au long de la journée (pas seulement quand la soif est déjà là)
  • éviter les sodas très sucrés, les boissons énergétiques et l’alcool en même temps que de grosses sessions de vape
  • éviter de vapoter juste avant d’aller vous coucher si vous êtes sujet au reflux nocturne

Et côté alimentation, les classiques restent vrais : repas très gras, très copieux, consommés tard le soir + forte consommation de nicotine (cigarette ou e-cig) = combo gagnant pour un RGO joyeux toute la nuit.

Quand parler de votre vape à un médecin ?

Si vous cochez une ou plusieurs de ces cases, un avis médical s’impose :

  • brûlures d’estomac fréquentes (plusieurs fois par semaine) depuis plus de 3–4 semaines
  • douleurs thoraciques atypiques (cela peut mimer un problème cardiaque)
  • perte de poids, fatigue importante, difficultés à avaler
  • sang dans les vomissements ou dans les selles

Vous n’êtes pas obligé de cacher votre vape au médecin. Au contraire :

  • précisez votre profil : ex-fumeur, fumeur/vapoteur, non-fumeur devenu vapoteur
  • donnez des infos concrètes : taux de nicotine, type de matériel, consommation journalière

Certains praticiens ne connaissent pas encore bien la vape, mais ces données les aideront à comprendre si votre e-cig est un facteur aggravant ou un moindre mal par rapport à la cigarette.

Vapotage, reflux et arrêt du tabac : garder la bonne priorité

Dernier point, mais essentiel : si vous venez de la cigarette classique, la priorité reste de ne pas y retourner. Les dégâts du tabac sur le reflux, l’œsophage et l’estomac sont bien plus documentés et généralement plus importants que ceux de la vape.

La stratégie la plus raisonnable ressemble souvent à ceci :

  • passer de la cigarette à la vape pour réduire l’exposition globale aux toxiques de combustion
  • adapter ensuite progressivement votre manière de vapoter pour limiter les symptômes de reflux
  • rester à l’écoute de votre corps et ne pas hésiter à ajuster encore (taux, matériel, fréquence) si besoin

Si malgré tous les réglages, votre reflux reste sévère et clairement lié à la vape, deux options restent sur la table :

  • réduire la vape à des moments bien définis, en limitant les expositions prolongées
  • envisager d’autres aides au sevrage nicotinique (patchs, gommes, pastilles) avec un suivi médical

L’idée n’est pas de diaboliser la cigarette électronique, ni de la présenter comme inoffensive. Comme souvent, tout se joue dans les nuances : comprendre comment elle interagit avec votre corps, ajuster ce qui peut l’être, et garder en tête la priorité numéro un pour votre santé à long terme.